#psPlaisir – Matière grise – Argent, plaisir et bonheur !

La chronique de Matière Grise démarre à 1:16:32
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Billet diffusé dans le cadre de l’émission radio-dessinée #psPlaisir le 16 janvier 2016 à Lausanne

Est-ce que l’un d’entre vous a déjà entendu parler d’ “Affluenza ? “

J’ai lu ce mot au détour d’un article sur le plaidoyer d’un jeune héritier Texan recherché pour quadruple homicide.

Affluenza

C’est quand même pas rien.

Le terme « Affluenza », appelée la Fièvre du Luxe aux USA ou L’Angoisse du pauvre en Australie, a notamment été définie dans le livre « Affluenza, The All-Consuming Epidemic – L’épidémie du consomme-tout », datant de 2002.

« Affluenza, The Epidemic – L’épidémie du consomme-tout

On peut y lire ceci : Affluenza, une douloureuse maladie contagieuse, transmise par la société et dont les signes sont un sentiment de remplissage, le doute, l’anxiété et le dégoût qui résulte de l’idéologie du « toujours-plus ».

Concrètement, ce mot popularisé à la fin des années 90, désignerait une maladie causée par l’influence de l’argent dans la réussite sociale, et le pouvoir que cette course au rêve américain peut avoir sur nous.
Mais malgré l’aspect absurde du cas de ce jeune garçon, l’argent est de nos jours bien plus qu’une monnaie ; il définit votre réussite, votre rang et acceptation sociale. Par conséquent, il a une influence directe sur notre comportement et nos émotions.

statut social

Le premier lien que l’on fait, surtout après les fêtes, c’est les cadeaux  !

cadeaux

Pas la version avec le père-noël, on parle bien-sûr de l’achat.

Bien qu’il soit normal de faire des courses dans les supermarchés, cela ne s’apparente plus vraiment à notre survie : il est bien plus question de plaisir.

D’ailleurs, près 60% de nos achats, encore plus en période de fêtes, déclenche chez nous un reflexe vieux comme l’humanité, celui du circuit de la récompense dont Mel a brillamment parlé tout à l’heure.

Et comme évoqué, nous avons tous ce circuit de la récompense quelque part dans notre cerveau ; il se retrouve chez la plupart des vertébrés, du poisson à l’humain. Oui, nous sommes des animaux après tout !

Nous sommes des animaux après tout

Ce système est une des clés de notre survie et de notre évolution, et lorsqu’il est stimulé, par la surprise, la peur, la nourriture, le sexe… Il se met à apprendre et à assimiler de nouveaux fonctionnements.

Pour quelque chose de primitif, on se rend compte que ça reste très compliqué, on va diviser ce comportement en 3 parties :

  1. Cognitif : « Comment obtenir la récompense ? »
  2. Motivation : « Ai-je envie d’avoir la récompense ? »
  3. Affectif : « Qu’est-ce que la récompense ? »

Ici, le Comment c’est par exemple l’achat

La motivation, c’est la libération de dopamine

Et la récompense, c’est la présence de dopamine joliment appelée hormone du plaisir.

Le pouvoir inconscient de l’argent sur nos psychés est pour le moins étonnant, une étude chinoise a étudié son effet sur des gens de niveaux sociaux différents ; alors que certains ont compté des billets…

man counts money in hands dollar usa

… D’autres ont compté des feuilles de papier. À la suite de ça, un test est effectué, où les participants doivent plonger leurs mains dans de l’eau très chaude…

les participants doivent plonger leurs mains dans de l’eau très chaude,

… Et rester aussi longtemps que possible. Et les résultats sont flagrants : ceux qui ont manipulé l’argent sont capable résister en moyenne un tiers plus longtemps que les autres !

Paul Piff, professeur en psychologie et en comportement sociaux a longuement étudié l’influence de la hiérarchie sociale et de l’argent sur le comportement.Paul Piff

Il a mené des études à travers tous les États-Unis, et en partage maintenant les conclusions dans des conférences TED que je vous invite à regarder.

Et donc, ce Piff, à part avoir un nom rigolo, a pu parvenir à des résultats parfois effrayants. Dans une étude,  300 participants étaient répartis en deux catégories : riches et pauvres.

riches et pauvres

On leur a présenté des photos ou des entretiens d’inconnus, en leur demandant ensuite de discerner des émotions sur leur visage

riches moins empathiques ?

Moins le revenus des gens étaient élevés, plus leur résultats étaient corrects ; les riches seraient donc moins empathiques.

C’est entre autre parce qu’entre pauvres, t’as pas d’autre choix que de te serrer les coudes, et espérer que les autres fassent de même pour toi. Le contact avec l’argent, et sa possession, ont tendance à rendre auto-suffisant. Genre : « Puisque je me débrouille très bien et gagne bien ma vie, c’est accessible à tout le monde ; ils n’ont qu’à se bouger et faire pareil ».

self made man

Mais soyons clair, ce ne sont pas les 20.- qui traînent dans votre poche qui vont vous transformer en monstre. Et puis le monde n’est ni tout noir ni tout blanc : les pauvres aussi ont leurs travers.

Lors de sondages, la personne peu aisée voit la richesse comme une sorte de maladie, dont les symptômes seraient d’être un connard.

connard...

Tout est une question de perspective et d’amalgames.
Alors bon, essayons de ne pas tomber dans un scénario du bon et du méchant. Et même si avoir de l’argent aurait tendance à rendre moins empathique, plus aisé et plus résistant, le dépenser augmente la détresse sociale, et la pression sociale augmente au fur et à mesure que votre statut social varie. Et peu importe la taille du compte en banque ; c’est pareil pour tout le monde, il faut se méfier des retours de karma !

Bref, l’argent et cette mécanique pavlovienne, à l’origine très importante pour l’instinct de survie, laisse également de nouveux horizons pour les industriels. Avec des dollars à la place des yeux, le monde voit une toute nouvelle d’immersion de la relation entre un client et le produit acheté : Le NeuroMarketing.

neuromarketing

Cette pratique très convoersée a pour but étant d’effectuer un monitoring sur le cerveau lorsque des clients cobayes effectuent leurs achats, ou sont exposés à des produits. L’utilité concrète ? Provoquer une envie d’acheter compulsive, ou au moins inconsciente, comme pour la souris avec son buzzer.

Au fond, pour beaucoup, aller au supermarché n’est pas de l’ordre de la survie, mais du plaisir. Notre instinct de chasseur cueilleur est bien loin derrière, et ça c’est bon pour le marché !

– Mais est-ce que c’est forcément bon pour le moral ? Je veux dire, dans la quête du succès et de prospérité, les riches ont-ils perdu la capacité d’être réellement heureux ? Les nouveaux riches, les gagnants des loteries sont-ils réellement plus heureux maintenant ?

et les nouveaux riches, alors ?

C’est dur à dire si l’argent veut réellement dire bonheur. En tout cas, des études menées notamment sur des gagnants de loteries, indiqueraient qu’une fois un certain montant atteint, variant entre 35’000 et 55’000 euros par an, le reste ne fait plus beaucoup de différence.

En particulier lors du gain de grosses sommes type Euro Millions, déjà on est un peu moins heureux après s’être fait taxer par l’Etat, et après un « pic » de joie durant entre quelques semaines et quelques mois, très vite on retrouve son état normal, voire pire ; tout dépend comment on décide de gérer ses gains. Par exemple, beaucoup s’endettent dans le futur pour maintenir leur niveau de vie qu’ils ont atteint avec la somme gagnée.

C’est un peu comme une drogue, avec une montée, un plateau, et une descente ! Les plus riches souffrent plus facilement de dépression, et les valeurs matérialistes sont associées à une faible satisfaction relationnelle.

Y a qu’à regarder le taux de dépression et de suicide entre l’Afrique et la Suisse pour se faire une idée.

On apparente souvent l’argent à l’accès facilité à ce dont on a envie. Mais ce dont on a envie n’est pas nécessairement ce dont on a besoin !

Être heureux, très basiquement, c’est d’avoir un job stable, des conquêtes, des biens, des amis à voir et un corps en bonne santé.

Etre heureux...

Et il est vrai que l’argent peut transformer certains de ces aspects. Mais n’oublions pas qu’avec votre compte en banque aussi gros soit-il, vous ne pourrez pas vous passer de ces choses pour être heureux.

Le rôle primaire de l’argent n’est pas d’augmenter son bonheur, mais d’atteindre ses buts et d’être autonome, avoir un seuil de vie agréable.

Un peu comme le chocolat, un peu…  Ça libère de la dopamine ! Trop, et on est malade !

D’ailleurs, voilà une dose de plaisir pour tout le monde ! (distribution de pièces en choco)

Sources

 

 

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