Dossier – les graisses alimentaires

 

Dossier de l’épisode #52.

Je ne sais pas vous, mais quand on parle des différents types de graisses alimentaires, je me rappelle juste que les oméga-3, c’est bien et que les graisses animales, c’est mal.

Photo: le rayon "margarines" d'une supérette de quartier à Montréal, été 2009

C’est un peu court… Et il y a pire: dès qu’on parle saturé, monoinsaturé, polyinsaturé, ou si on me demande ce que c’est, en fait, que des acides gras trans,  je suis complètement paumé. Ou plutôt, j’étais paumé. Ça va mieux depuis ma petite investigation et je me réjouis de partager mes découvertes avec vous.

L’importance des graisses pour le métabolisme

Avant de parler de métabolisme, on peut carrément parler du vivant. On l’a vu avec Pierre Kerner lorsqu’il évoquait l’origine de la vie il y a un mois dans le premier volet de  son incroyable dossier sur l’arbre du vivant. La soupe primordiale était bourrée de lipides et on retrouve ces derniers jusque dans les membranes des cellules de tous les êtres vivants. Pas de gras, pas de vie, c’est aussi simple que cela.

Dans les organismes complexes, nous par exemple, les graisses assurent diverses fonctions:

Stockage d’énergie

Les triglycérides  (ou triacylglycérols), stockés dans les tissus adipeux, sont l’une des principales formes de stockage d’énergie chez les animaux. On verra un peu plus loin dans le dossier, dans le détail, ce que sont ces triglycérides. Les adipocytes, ou cellules grasses, sont spécialisées dans la synthèse et la dégradation, en permanence, de ces triglycérides. Elles sont contrôlées par l’activation hormonale d’une enzyme nommée lipase (un petit article pour en savoir plus sur les adipocytes). L’oxydation complète d’acides gras fournit une énergie extraordinaire, de l’ordre de 9 kcal/g, à comparer aux 4 kcal/fournis par la dégradation d’hydrates de carbones (c’est à dire de sucres) et de protéines.

Bon, ça, c’est pour la fonction qu’on connaît tous, qui nous vaut bourrelets et autres poignées disgracieuses et qui fait la fortune des cliniques de chirurgie esthétique. Mais les graisses assurent d’autres fonctions essentielles dans l’organisme.

Signalisation

Les recherches de ces dernières années ont mis le doigt sur les signaux lipidiques, élément essentiel des signaux cellulaires. On ne va pas entrer dans les détails ici, mais on va retenir que de nombreuses variétés de lipides ont été identifiées comme messagers cellulaires.

Autres fonctions

On n’y pense pas forcément dans ces termes, mais les vitamines liposolubles, les vitamines (ADE and K) ont également besoin de graisses pour être métabolisées. D’ailleurs ces vitamines elles-même sont des lipides. Stockées dans le foie et les tissus adipeux, elles sont essentielles, comme toutes les vitamines (c’est à dire qu’elles sont indispensables à l’organisme et que ce dernier est incapable de les produire lui-même). Une carence totale en vitamine A empêche la croissance et rend aveugle, les carences en vitamine D entraînent le rachitisme. En vitamine E, la stérilité et l’anémie du nouveau-né, et K, des hémorragies…)

L’article “Fat” de Wikipédia (version en anglais) indique en outre que les lipides peuvent servir de zone tampon pour les substances toxiques présentes en trop grandes quantités pour être absorbées par le flux sanguin. Ce qui permet de protéger les organes vitaux jusqu’à ce que les substances puissent être soit métabolisées soit éliminées par les selles, l’urine, le sébum, ou les cheveux. Cette section de l’article ne cite aucune référence et je n’ai pas eu le temps de creuser, à prendre avec des baguettes, donc.

Bref, dans tous les cas, simplement dire, “il faut éviter les graisses” est un discours simpliste complètement erroné. On s’en doutait. Ceci dit, l’abus de graisses alimentaires pose un vrai problème de santé publique.

Un problème de santé publique

Selon l’Oganisation Mondiale de la Santé (OMS), je cite,

  • Les maladies cardio-vasculaires sont la première cause de mortalité dans le monde: il meurt chaque année plus de personnes en raison de maladies cardio-vasculaires que de toute autre cause.
  • On estime à 17,1 millions le nombre de décès imputables aux maladies cardio-vasculaires, soit 29% de la mortalité mondiale totale. Parmi ces décès, on estime que 7,2 millions sont dus à une cardiopathie coronarienne (ndlr, c’est à dire des angines de poitrine et des infarctus du myocarde, petit nom de la crise cardiaque) et 5,7 millions à un AVC (ndlr: c’est à dire un accident vasculaire cérébral ou encore une attaque cérébrale) (dernières statistiques 2004)

Sur les causes, l’OMS donne les indications suivantes:

Les infarctus et les accidents vasculaires cérébraux sont généralement des événements aigus et sont principalement dus au blocage d’une artère empêchant le sang de parvenir au cœur ou au cerveau. Leur cause la plus courante est la constitution d’un dépôt gras sur les parois internes des vaisseaux sanguins alimentant ces organes. Les accidents vasculaires cérébraux peuvent aussi résulter du saignement d’un vaisseau sanguin cérébral ou de caillots.

Quels sont les facteurs de risque?

Les principaux facteurs de risques des cardiopathies et des AVC, sont une mauvaise alimentation, un manque d’activité physique et le tabagisme. Ces facteurs de risque comportementaux sont responsables d’environ 80% des maladies coronariennes et cérébraux vasculaires.

Les effets d’une mauvaise alimentation ou de l’inactivité physique peuvent se manifester par de l’hypertension, une élévation du taux de glucose ou du taux de lipide, un excès de poids ou une obésité, ces effets étant appelés «facteurs de risque intermédiaires».

(…)

Et le problème ne va pas en s’améliorant, l’OMS estimait en 2005 que 65.7% de la population des Etats-Unis était en surpoids (c’est quand même 2/3 de la population!) et  30.6% obèse. Obèse ne veut pas juste dire “gros”. Au sens de l’OMS, depuis 1997,  c’est une maladie. Obésité signifie “accumulation anormale ou excessive de graisse corporelle qui peut nuire à la santé ”

Je prends un peu des raccourcis, toutes les maladies cardiovasculaires ne sont pas dues à l’obésité, loin s’en faut, et la surconsommation de graisses n’est pas seule incriminée dans l’obésité, ce sont des sujets qui mériteraient à eux seuls un petit dossier, mais je voulais juste donner un peu de contexte à mon propos. La problématique des graisses que nous avalons en permanence n’est pas à prendre à la légère. C’est un problème extrêmement sérieux qui touche beaucoup de monde et ne serait-ce qu’à ce titre, je pense qu’il vaut la peine qu’on s’y penche d’un peu plus près.

L’utilisation des graisses par l’homme

En fait, les pays riches se trouvent aujourd’hui dans un contexte tout à fait unique à l’échelle de l’évolution humaine. Pour la première fois dans notre histoire, nous n’avons pas à affronter de famines ni à devoir dépenser une énergie folle pour manger à peu près à notre faim. À moins d’être un désorganisé du frigo et des courses, la nourriture nous est accessible en grandes quantités 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Mais les comportements que l’évolution a favorisé pendant des millions d’années comme le goût pour les aliments sucrés et gras, autrefois rares et salutaires, n’ont pas disparu avec l’omniprésence des McDo et des supermarchés. Le réflexe de s’empiffrer pour sa survie est toujours bien présent.

La journaliste scientifique Marion Sabourdy – alias @fuzzyraptor a récemment publié un post sur ssaft, le blog de Pierre Kerner, intitulé “J’ai testé la vie au paléolithique“. Son article, très sympa, est bien sûr plutôt critique à l’égard du régime paléolithique tendance bobo très en vogue dans certains petits milieux, mais sa lecture nous rappelle tout de même que notre diète a bien changé avec la sédentarisation du néolithique, modèle précurseur de notre civilisation actuelle. Cro-Magnon et Cro-Magnonette se nourrissaient de fruits, de graines, de racines, de noix, du poisson qu’ils pêchaient, de la viande (par définition plutôt maigre) du gibier qu’ils chassaient. Pour les hydrates de carbones, pas de sucre raffiné à l’époque, ni même de céréales. On se contentait du fructose que contiennent les fruits et de temps en temps, si on avait de la chance, on s’offrait une petite lèche de miel. Idem pour les matières grasses. Pas de beurre, d’huile d’arachide ou de saindoux pour faire revenir les médaillons poêlés, on se contentait des apports gras du poisson, des graines et des noix. Et pour ce que l’on sait que nos amis du paléolithique, contrairement à de nombreuses idées reçues, ils se portaient plutôt bien, étaient grands, n’avaient pas de caries et vivaient plutôt vieux quand ils n’étaient pas freinés dans leurs projets de retraite par quelque tigre à dents-de-sabre de passage (source: An evolutionary perspective enhances understanding of human nutritional requirements, Eaton&Conner, The Journal of Nutrition, 1996)

Au néolithique, en revanche, dès qu’on a élevé du bétail et pressé des olives, tout a changé. On pourrait presque dire que la voie de l’avènement du big mac était toute tracée. Articles intéressants ici :

Illustration: la marche du progrès selon Fuzzyraptor (piqué sur SSAFT avec la bénédiction de Pierre)

Qu’est-ce que la graisse?

Intéressons-nous maintenant aux graisses à proprement parler. Au fond, c’est quoi la graisse? Si on en croit notre bon ami wiki:

La graisse est un corps gras se présentant à l’état solide à température ordinaire. Le terme s’oppose aux huiles qui se présentent sous forme liquide. On distingue les graisses des cires, de composition similaire mais qui possèdent un point de fusion supérieur à 45 °C.

L’article Wikipedia ne nous apprend pas grand chose de plus, pour une fois. Il est assez lamentable en fait. La graisse est un corps gras. Dans le genre tautologie, on ne fait pas mieux. Alors, j’ai ressorti et épousseté mon bon vieux “Petit Robert” pour y découvrir que la définition n’est pas beaucoup plus claire:

Graisse: corps gras, matière grasse. Graisses animales, végétales (alimentaires ou industrielles). Voir beurre, huile, lanoline, margarine, spermaceti, suif.  Les graisses sont insolubles dans l’eau, combustibles et saponifiables (ndpv: càd transformables en savon) (…)

Pas terrible non plus… En résumé, la graisse, c’est gras. Ça brûle. C’est transformable en savon et ça ne se mélange pas à l’eau. De plus, graisse, huile et cire ont le même type de propriétés mais un point de fusion différent (c’est à dire qu’à pression équivalente, elles passent de l’état solide à l’état liquide à une température différente).

Le Petit Robert nous indique encore que les graisses peuvent être d’origine animale, végétale ou minérale, c’est-dire, obtenues par distillation du pétrole.

C’est marrant, je ne m’étais jamais rendu compte à quel point tout cela est imprécis. Graisse “minérale” obtenue par distillation du pétrole (dont on sait que la plupart de ses composants sont d’origine organique), c’est non seulement flou, mais carrément contradictoire… La chimie est bien plus précise que le Petit Robert, heureusement. De ce point de vue, les graisses minérales sont des alcanes,  dans une gamme précise, entre C15 et C40 si vous voulez tout savoir).

Mais bon, tout le monde est d’accord sur un point. Les graisses minérales ne se mangent pas. Or nous parlons aujourd’hui de graisses alimentaires, on va donc recadrer un peu et s’en tenir aux graisses animales et végétales, qui sont un sous-groupe des lipides répondant au doux nom de triglycérides, on avait dit qu’on reviendrait.

Mais avant d’y revenir, on va faire un dernier petit détour par le cholestérol, ça nous permettra de bien avoir tous les paramètres en tête quand on parlera des différentes problématiques liées aux différents types de graisse.

Le cholestérol

notre ami Wiki nous dit:

Le cholestérol est un lipide de la famille des stérols qui joue un rôle central dans de nombreux processus biochimiques.

Le corps s’en sert notamment comme point de départ pour fabriquer les œstrogènes et la testostérone.

Ni les graisses le cholestérol ne peuvent se dissoudre dans l’eau, on l’a vu. Ni dans l’eau, ni dans le sang, ce qui est plutôt problématique pour les faire circuler. Alors le corps a trouvé sa petite stratégie pour faire face à ce problème de chimie fondamental: il empaquette le gras et le cholestérol dans des minuscules particules recouvertes de protéines (qui elles, passent partout), c’est ce qu’on appelle les lipoprotéines.

Il existe de nombreuses variétés de lipoprotéines mais les plus importantes sont les triglycérides (si, si, promis, on va vraiment finir par y revenir!), les lipoprotéines de basse-densité (ou low-density-lipoprotein en anglais, abrégé LDL) et les lipoprotéines de haute-densité (high-density-lipoprotein, abrégé HDL).

  • Les LDL ou lipoprotéines de basse-densité transportent le cholestérol du foie vers le reste du corps. Les cellules se fixent sur ces paricules et en extraient le cholestérol. Quand il y a trop de cholestérol LDL, ces particules forment des dépôts sur les parois, entres autres, des artères coronaires (les artères qui recouvrent la surface du cœur). Ces dépôts – des plaques d’athérome –  rendent les artères plus, de fait, plus étroites et limitent les flux sanguins. Et quand des morceaux de plaque se détachent, cela peut provoquer un infarctus. On connaît mieux les LDL sous le nom populaire de MAUVAIS CHOLESTÉROL.
  • Les HDL, de leur côté, ou lipoprotéines de haute densité (High-density lipoproteins) récupèrent le cholestérol, depuis le sang, depuis les LDL et depuis les parois des artères pour le ramener vers le foie, où le corps les stocke en attendant d’en avoir besoin. Les HDL, sont un peu les camions-poubelle de la circulation sanguine. Pas de surprise, le petit nom populaire des HDL, c’est le BON CHOLESTÉROL.
On va garder tout ça en tête et reprendre notre petite investigation des graisses en général. Nous en étions donc aux graisses organiques, végétales et animales, et je vais donc enfin parler des triglycérides!

Les triglycérides

Structure chimique d'un triglycéride (Wikipédia)Chimiquement parlant, les triglycérides sont des acides gras (soit des chaînes d’atomes de carbone et d’hydrogène chapeautés par un groupe  d’acide carboxylique maintenus ensemble par une structure, généralement un glycérol, soit du carbone, de l’hydrogène, et de l’oxygène). Pour les puristes, les triglycérides sont des triesters de glycérol. Mais trêve de gros mots… J’ai juste envie de retenir que les triglycérides sont sympa à regarder. Si on les dépliait, ils auraient une forme de E majuscule.

Saturé et insaturé

On va rester un peu au niveau moléculaire pour comprendre la différence entre saturé et insaturé. Ne zappez pas, ça devient franchement intéressant.

Tous les acides gras n’ont pas exactement le même rapport hydrogène/carbone. Lorsque chaque atome de carbone est lié à deux atomes d’hydrogène, on dit que l’arrangement est  “saturé“, parce que les atomes de carbone sont “saturés” d’hydrogène, ce qui veut dire qu’ils sont liés au maximum possible d’atomes d’hydrogène.

Dans d’autres acides gras, un atome de carbone peut n’être lié qu’à un seul atome d’hydrogène et avoir une double liaison avec atome de carbone du voisinage.  Cela résulte en un acide gras “insaturé“. Plus précisément, dans ce cas, en un acide gras “monoinsaturé“. Alors du coup, qu’est-ce qu’un acide gras “polyinsaturé“? Eh bien simplement un acide gras qui contient plus d’une double liaison carbone.

Mais pourquoi est-ce que c’est si important pour nous de savoir si un acide gras est saturé ou insaturé?

Les différences se situent essentiellement à deux niveaux:

  1. l’énergie qu’ils contiennent;
  2. le point de fusion (pour rappel, la température à laquelle ils passent de l’état solide à l’état liquide).

Dans la mesure où les graisses insaturées contiennent moins de liaisons carbone-hydrogènes que les graisses saturées, elles libéreront moins d’énergie dans le métabolisme. Pas que l’hydrogène en soi soit plus grasse… C’est juste une question de géométrie. C’est comme au tétris: les acides gras saturés forment une belle ligne droite. Du coup, ils s’empilent parfaitement et cela donne une graisse bien compacte, du genre qui se fige au frigo. Tandis que les acides gras insaturés partent dans tous les sens et ne s’empilent qu’en laissant du vide entre deux molécules.

Et les acides gras “trans”?

Imaginons que nos atomes de carbone forment une ligne horizontale, comme un collier de perles déroulé. Lorsqu’un atome d’hydrogène vient se lier à l’un des atomes de carbones, il peut se placer soit au-dessus, soit en-dessous de l’atome de carbone. Quand on laisse faire la nature, l’hydrogène se place de manière aléatoire, sans pattern précis. Parfois dessus, parfois dessous. Et c’est pour ça que les acides insaturés s’emboîtent mal, on vient de le voir. Mais la plupart des acides gras trans sont produits artificiellement et leur structure moléculaire est nettement moins chaotique. Les atomes d’hydrogène sont parfaitement alignés, les molécules s’emboîtent, le gras se fige aussi au frigo, et vos artères font la gueule.

L’effet de ces différents types d’acides gras sur la santé

En termes de santé, entre saturé, trans et insaturé, il n’y pas photo.

Examinons d’abord les graisses saturées:

Notre corps sait les fabriquer. Nous n’avons aucun besoin d’en manger. On l’a vu, les anciens homo sapiens n’en mangeaient pas et ne s’en portaient pas plus mal. Dans les pays occidentaux, la plupart des acides gras saturés proviennent de la viande, de la volaille (surtout la peau), des fruits de mer, et des produits laitiers (fromage, lait, crème, glace…) Contrairement à ce qu’on pourrait croire, on en trouve aussi dans certaines graisses végétales, qui sont tout aussi mauvaises pour la santé. J’ai nommé l’huile de coco, l’ignoble huile de palme et l’huile de palmiste. Toutes ces graisses et huiles ont en commun d’élever le taux de LDL (mauvais cholestérol). Il faut donc les éviter à chaque fois qu’on en a la possibilité.

J’ouvre une minuscule parenthèse sur l’huile de palme. C’est la minute militante du Professeur Von. L’huile de palme est l’huile végétale la plus consommée sur la planète. 25% du marché même si on ne la trouve pas en supermarché. Elle est massivement utilisée dans les produits industriels, dans la restauration, partout. Elle est indiquée comme “huile végétale” sur les emballages. Parce que c’est autorisé. Et parce que les huiles végétales ont encore une bonne presse. Et pourtant… Autant manger du saindoux à la petite cuillère, ce n’est pas pire pour les artères. Mais ce n’est pas tout! L’utilisation massive de l’huile de palme par les industriels est à l’origine d’un désastre écologique sans précédent! Plus de 90% des forêts des pays producteurs, soit (Malaisie, Indonésie, Bornéo et Sumatra ont disparu au profit des palmeraies. Les conséquences pour la biodiversité sont catastrophique et nos cousins les orang-outans, en voie d’extinction, n’ont qu’à crever, en silence pour qu’on puisse s’empoisonner en paix. Voilà, je ne gueule pas souvent, mais c’est pour la bonne cause. Podcast Science offre un t-shirt à quiconque arrive à vivre une semaine entière sans consommer un gramme d’huile de palme. (Documentation à l’appui bien sûr, on est scientifiques dans l’âme 😉 )

Les ravages de l'huile de palme sur la forêt tropicale

Bref… Les graisses saturées, sont à ranger dans la catégorie “pas bon”, même si un petit barbecue en été ou une petite fondue en hiver, ça ne se refuse pas 😉

Les acides gras trans:

Si les graisses saturées sont à classer dans la catégorie “pas bon”, les acides gras trans sont carrément à ranger dans la catégorie “très mauvais”, pour ne pas dire toxiques. Elles sont pires que les graisses saturées quant à leur potentiel d’augmenter le taux de LDL et de diminuer le taux de HDL. Pour chaque 2% de calories absorbées quotidiennement issues des graisses trans (soit une portion de frites moyennes du MacDo), le risque de problèmes cardio-vasculaires augmente de 23%. Selon une étude américaine de 2006, (version payante ici et gratuite là, sur un site chinois), éliminer les graisses trans du régime des Etats-Unis préviendrait d’un coup entre 6 et 19 pourcent des infarctus (et morts associées), soit plus de 200’000 cas en moins chaque année. (13)

Les acides gras insaturés

Les graisses insaturées en revanche, sont à ranger dans la catégorie “bon”. Voire très bon. En 2003, une équipe de chercheurs néerlandais a publié une méta-analyse dans le American Journal of Clinical Nutrition. En se basant sur 60 études contrôlées différentes, il ont pu affirmer que remplacer les hydrates de carbone par des graisses mono- et poly-insaturées réduit de manière spectaculaire la présence de LDL dans le sang (LDL ou mauvais cholestérol). Ceci dit, quand on regarde un peu dans le détail, on s’aperçoit qu’il y a plusieurs catégories de graisses insaturées et qu’elles ne sont pas toutes au top.

Et les oméga 3 et oméga 6 dans tout ça?

Les acides gras N-3 et N-6 (appelés Oméga 3 et 6 dans la culture populaire uniquement) sont des acides gras polyinsaturés essentiels, c’est à dire qu’ils sont vitaux pour le métabolisme mais ne peuvent pas être synthétisés par le corps humain. Il est essentiel de s’en procurer via l’alimentation.

Les Oméga-3 ont une double liaison carbone=carbone au niveau du 3e atome de carbone dans la chaîne. Et les Oméga-6 au niveau du… 6e bien sûr!

Pour info, il existe également des Oméga-9, on en trouve dans des graisses d’origine animale et végétale, mais ceux-là ne sont pas essentiels car ils peuvent être synthétisés par l’organisme à partir d’acides gras insaturés.

Oméga 3 vs Oméga 6, une question de ratio

Les Oméga 3 sont super à la mode. Il ne se passe jamais plus de quelques semaines avant qu’un nouvel article ne soit publié, vantant leurs qualités (la semaine dernière, c’était l’effet bénéfique des oméga-3 de type DHA dans la réduction des effets des accidents vasculaires cérébraux). On les étudie massivement depuis les années 1970 et on ne cesse de leur découvrir de nouvelles vertus. Une chose est sûre, on n’en consomme en moyenne pas suffisamment. L’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments (l’AFSA), dans son rapport disponible en ligne, indique qu’on devrait en consommer 2 grammes par jour en moyenne et qu’on en est loin (les pêcheurs japonais et crétois en consomme 3 grammes)

Dans le même temps, les Oméga 6, consommés en excès sont reconnus comme cause d’infarctus, d’accidents vasculaires cérébraux, de troubles du rythme cardiaque, d’arthrite, d’ostéoporose, d’inflammations, de troubles de l’humeur, d’obésité et de cancer (après cette tirade, un petit lien s’impose sur l’étude anglo-américaine publiée en 2006 dans l’American Journal of Clinical Nutrition et qui affirme tout cela)

Ceci dit, de nombreuses études s’accordent sur le fait le problème, ce n’est pas les Oméga-6 mais le ratio entre les Oméga 6 et 3 qui est en cause dans notre alimentation: dans nos régimes occidentaux modernes, ce ratio est de 10-1, voire de 30-1 dans les cas extrêmes, alors qu’il devrait se situer dans les 4:1 (accès à l’abstract d’une étude de référence sur la question. Malheureusement l’article complet est payant, je ne l’ai pas trouvé en version gratuite).

En synthèse

Les diététicien-ne-s nous ont abreuvés par médias interposés de discours hyper-simplistes sur la question. En résumé, “les graisses animales, c’est pas bon, il faut leur préférer les huiles végétales”. Le discours a montré ses limites, tout le monde sait que les Oméga 3 du saumon sont plutôt bénéfique et presque tout le monde sait que les margarines hydrogénées (acides gras trans) et l’huile de palme sont extrêmement néfastes pour la santé. Pour ma part, je pense que la base “animal vs végétal” est un bon point de départ, mais qu’il faut bien tenir compte des exceptions.
En résumé,

  • les graisses saturées sont mauvaises pour la santé car elles augmentent le taux de mauvais cholestérol. Ce sont essentiellement les graisses animales (gras de canard, la peau de poulet, le saindoux, la graisse de rognons, les viandes grasses), la graisse de coco, l’huile de palme et de palmiste. Après, il faut nuancer. Le lait par exemple… Une enquête de l’émission suisse de défense des consommateurs, ABE, révélait l’année dernière que le lait bio contient 2 fois plus d’oméga-3 que le lait ordinaire de supermarché. Simplement parce que les vaches broutent, entre autres, du lin, et pas juste le trèfle ou le foin plus rentable. Idem pour les oeufs, la composition de leurs graisses va dépendre de la qualité du grain qu’on aura donné à dame poule;
  • l’huile de palme (indication: “graisse végétale” sur les emballages) est à proscrire à tout prix;
  • les graisses trans, qu’on trouve de moins en moins en Europe: les règlementations deviennent plus sérieuses, sont à bannir totalement aussi (margarines hydrogénées par exemple);
  • les graisses insaturées sont globalement meilleures pour la santé.
    • mono-insaturées: on les trouve en quantités variables dans l’huile de colza, d’arachide, d’olive. Dans les avocats. Dans les amandes, noisettes, noix de pécan et dans les graines (comme les graines de courge ou de sésame);
    • poly-insaturées: on les trouve en quantités élevées dans le tournesol, le maïs, le soja, les graines de lin, les noix, les poissons gras;
    • parmi les poly-insaturées, les meilleures de toutes, à privilégier autant que possible: on les trouve dans les poissons gras (saumon (surtout sauvage), le flétan, le hareng, le maquereau, les anchois et les sardines), l’huile de chanvre, l’huile de lin, les graines de lin, les graines de chia (une sorte de sauge), les noix, l’huile de colza, le soja et les légumes verts (chou, mâche, laitue, même si c’est en très petites quantités).

Maintenant, on n’a pas toujours le choix. Et finalement, tout est affaire de quantités…
Je n’ai pas détaillé les différents types d’oméga-3 ni les différents types de margarine, ni même les différents acides gras à proprement parler, il y plus de 30 sortes d’acides gras saturés, par exemple. Il y en aurait encore pour des heures et des heures tant le sujet est vaste et passionnant.
On reprendra peut-être un élément ou l’autre dans un prochain podcast, qui sait. En attendant, je vous conseille la lecture d’un dossier génial que j’ai trouvé sur le site de l’école de santé publique de l’Université Harvard dont je me suis largement inspiré pour ce petit dossier. Ou encore, l’histoire des graisses trans illustrée, tout simple et passionnant, par le “American Heart Association“. Ou encore [edit 2015] le guide Katom : https://www.katom.com/learning-center/myplate-resource-guide.html [/edit] Stay fit!

Derniers épisodes