Sénescence et sélection naturelle

Billet publié par David (Xilrian) dans l’épisode# 107, dans le cadre de la semaine thématique sur la mort du C@fé des Sciences

Petit article donc sur la mort au niveau biologique et plus exactement pour tenter d’expliquer pourquoi nous mourons.

Déjà, nous ne sommes pas immortels car nous sommes destructibles; ce qui est assez évident… Et il semble assez complexe de créer un être vivant indestructible (même si la nature en a créé de vraiment fort résistants comme les organismes thermophiles). Ce n’est donc point à cela que je vais m’intéresser mais plutôt au mécanisme du vieillissement. A ce qui dans leur programmation biologique rend les être vivant davantage vulnérable avec l’âge, la sénescence. Anhtuan avait abordé la question dans l’épisode 13 de podcast science et il me semble que Pierre Kerner en avait aussi aussi parlé dans son dossier sur l’évolution.

Je ne vais pas non plus détailler ces mécanismes, il faut juste savoir qu’ils sont nombreux. Il existe être autre le raccourcissement des télomères de nos cellules (qui limite le nombre de divisions qu’elles peuvent effectuer), les déchets intra et extra cellulaires, les cancers et bien d’autres choses (cf. Aubrey de Grey). Ce qu’il faut savoir c’est qu’il existe assez souvent des exceptions dans le monde du vivant, des êtres vivants qui ne sont pas soumis à l’un ou l’autre de ces mécanismes, comme les méduses Turritopsis Nutricula qui, dans certaines conditions, inversent leur processus de vieillissement cellulaire.

Cela montre que si le vieillissement existe, il aurait pu en être autrement…
Comment expliquer alors que la sélection naturelle ait favorisé un tel mécanisme ? Ne serait-il pas dans l’intérêt de nos gènes (ou du réplicateur que l’on considère du point de vue de la sélection naturelle, quel qu’il soit) de pouvoir se reproduire le plus longtemps possible et donc de vivre le plus longtemps possible ?

Cherchons une explication, la première généralement avancée est assez simple… Les modifications délétères concernant la période de vie post- reproduction ne peuvent être éliminées par la sélection naturelle, or les modifications néfastes sont bien plus probables que celles positives. Le vieillissement serait donc dû à une accumulation de mutations délétères après la période de reproduction par dérive génétique.

L’explication semble assez logique mais avant de continuer, qu’entend-on ici par période de reproduction? On en reparlera par la suite mais la ménopause est rare dans le monde du vivant; on ne parle donc pas ici d’une période entre la puberté et la ménopause. Mais nous admettrons que, même en postulant une immortalité biologique et donc sans prendre en compte le vieillissement, un être vivant a une espérance de vie. Les décès étant alors extrinsèques : ce sont des accidents ou le résultat de compétition entre êtres vivants (prédateurs).

Maintenant, comment tester cette affirmation? Eh bien en comparant l’âge maximal que peut atteindre un membre d’une espèce ayant beaucoup de prédateurs (et donc une espérance de vie hors vieillissement de toutes façons assez courte) à une autre espèce ayant moins de prédateurs (et donc susceptible d’avoir une espérance de vie hors-vieillissement plus longue).
Et cela marche : les oiseaux marins qui ont très peu de prédateurs se reproduisent tardivement et peuvent atteindre des âges très élevées. Tandis qu’à l’inverse, les oiseaux incapables de voler et qui ont donc de nombreux prédateurs, se reproduisent assez jeunes et ne peuvent atteindre des âges très important même élevés dans un environnement sans danger.

Enfin, en complétant cela par une approche génétique, il faut ajouter qu’un même gène peut intervenir à plusieurs moments du développement et avoir des fonctions complètement différentes à ces différents moments. Il est évident qu’un gène divisant par deux vos chances de survie à la naissance mais augmentant très fortement votre fitness après votre période de reproduction aura bien moins de chance d’être sélectionné qu’un gène augmentant votre survie à la naissance et vous tuant quelques années après la naissance de votre première descendance.
Néanmoins, avec cette explication, le vieillissement est lié à l’espérance de vie. C’est une explication qui peut ne pas être complètement satisfaisante. On pourrait entre autres, avec cette théorie, s’attendre à voir des cercles vicieux et vertueux et voir l’âge maximal augmenter ou diminuer de plus en plus avec l’espérance de vie jusqu’à atteindre des âges limites extrêmement élevés (ou bas).

Une explication complémentaire consiste à voir la mort et le vieillissement, comme un altruisme. Les être vivants sont en compétition pour des ressources, généralement de l’énergie et de l’espace. Un être vivant ne vieillissant pas limiterait très rapidement les ressources disponibles en saturant l’espace.

La mort et le vieillissement seraient donc un moyen de maximiser les chances de sa descendance. Cela n’est pas forcement si simple que cela à valider d’un point de vue sélection naturelle, mais on y arrive que ce soit avec la théorie du gène égoïste ou la sélection naturelle.

C’est le genre d’attitude que l’on retrouve avec la mante religieuse qui va manger son compagnon après s’être accouplée.

Par ailleurs, la mort peut être un moyen de réguler la sélection naturelle de même que le taux de mutation. En gros, limiter l’espérance de vie, c’est dans une certaine mesure, multiplier les cycles reproductifs et accélérer la sélection de l’espèce.

Un petit article qui détaille tout ça : http://rms.medhyg.ch/numero-210-page-1481.htm

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