La lune influence le sommeil, info ou intox?

Réponse donnée par Alan dans l’épisode #112.

La lune a toujours fasciné l’humanité. Toutes cultures confondues, pas moins de 70 divinités lui sont ou lui ont été associées, de la Grecque Séléné à l’Egyptien Thot !

Présence rassurante dans les nuits de nos ancêtres, la lune véhicule encore aujourd’hui toutes sortes de croyances plus ou moins vraisemblables, des loups-garous à l’agriculture biodynamique par exemple…

Les croyances populaires quant à l’influence de la lune sont tenaces, et plus particulièrement de la pleine lune (qui, soit dit en passant, n’a aucun effet sur son pouvoir d’attraction gravitationnelle).

Le site LiveScience a épluché quelques-uns de ces mythes, dont voici un petit florilège:

Crises d’épilepsie – Elles seraient favorisées par la pleine lune. Eh bien non, une étude publiée en 2004 dans le journal Epilepsy & Behavior n’a constaté aucune connexion entre les crises d’épilepsie et les phases de pleine lune.

Hospitalisations d’urgence – On finirait plus fréquemment aux urgences les nuits de pleine lune… Là encore, intox! Une équipe de chercheurs a examiné le registre du service des urgences d’un grand hôpital. Après avoir analysé 150’999 enregistrements, ils ont dû se rendre à l’évidence et ont indiqué dans un article de l’American Journal of Emergency Medicine en 1996 qu’aucune différence de fréquentation particulière n’est constatée les nuits de pleine lune par rapport aux autres nuits.

Troubles du sommeil –  Le sujet qui nous intéresse ici… Dans le Journal of Affective Disorders en 1999, des chercheurs ont émis l’hypothèse que, avant l’accès à l’éclairage moderne, “la lune était une source significative d’illumination nocturne qui affectait le cycle du sommeil, tendant à créer des insomnies autour de la pleine lune”. C’est à peu près tout ce que l’auteur du billet sur LiveScience a trouvé de scientifique sur le sujet. Pas beaucoup mieux de mon côté, j’en ai peur. J’ai bien trouvé des traces d’une étude autrichienne de 2009 indiquant que sur un panel de 341 patients dont 25% se croyaient insomniaques en phase de pleine lune, seuls 8% ont effectivement manifesté des troubles du sommeil lorsque tout a été soigneusement journalisé (http://www.sleep-aid-center.com/lunar-effects-how-full-moon-can-affect-our-sleep/ ), mais je n’ai malheureusement pas trouvé l’étude en question.

C’est à peu près tout ce que la science a à dire sur le sujet.

Une pseudo-théorie en vogue dans les années 70, dite des micro-marées biologiques postulait que puisque la lune a une influence sur les marées, et que nous sommes essentiellement constitués d’eau, la lune a forcément une influence sur les organismes vivants, et conditionnerait en partie les émotions humaines. Sur le web mondial, de nombreux sites ésotériques reprennent à leur compte cet espèce de techno-babble plus ou moins mystique. J’en ai même vu qui indiquent que des chercheurs du CERN approuveraient et soutiendraient la théorie, mais bien sûr, aucun nom ni aucune étude n’est jamais citée…

Selon mon Dr Karl préféré, la théorie présente au moins 3 défauts majeurs:

D’abord, les marées lunaires sont possibles parce que les océans sont immenses et constitués de liquide. Cela se produirait également s’ils étaient constitués d’hydrogène liquide congelé, de mercure à température ambiante ou même de métal en fusion. L’eau n’a rien à voir.

Deuxièmement, le phénomène des marées n’est possible que pour de grandes étendues. Cela ne marche pas à l’échelle d’un corps humain.

Troisièmement, les marées se produisent que la lune soit pleine ou non. L’effet gravitationnel de la lune sur la Terre est le même que le soleil l’éclaire complètement ou pas.

Bref… Vos légumes ne pousseront pas plus vite, il n’y pas plus d’admissions dans les hôpitaux psychiatriques les nuits de pleine lune. Pas plus de troubles de l’humeur ou du comportement en général, pas plus de suicides. La seule corrélation qui semble clairement établie, est celle des accidents d’animaux domestiques. 23% d’interventions vétérinaires en plus sur les chats et 28% sur les chiens dans les jours qui précèdent ou suivent immédiatement la pleine lune. C’est ce que révèle l’étude de 11’940 cas par des chercheurs du centre médical vétérinaire de l’Université d’Etat du Colorado. Peut-être parce que les gens laissent davantage sortir leurs animaux les nuits de pleine lune ou peut-être pas, l’étude n’a pas pu déterminer de causes au phénomène.

Moralité: quitte à ne pas dormir un soir de pleine lune, autant en profiter pour surveiller son chien. Encore un conseil indispensable de Podcast Science… Que deviendriez-vous sans nous?

 


UPDATE 2013 : en fait, ce n’est peut-être pas si tranché. Une étude publiée en été 2013 a fait pas mal de bruit. C’est la première du genre et elle a permis de mettre en lien une baisse de durée du sommeil avec les phases de la lune. Selon les auteurs de l’étude, il ne s’agit bien sûr pas de l’un des effets magiques supposés de la pleine lune, mais d’un vestige de rythme biologique (voir notre double dossier de décembre 2013 sur le sujet). On vous tient au courant s’il y a du nouveau bien sûr!


 

 

Sources:

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