Hubble a 25 ans !

Dossier de Johan, dans l’épisode 216 

Introduction

Hubble, avant d’être un télescope, c’est un astronome américain, Edwin de son prénom. Sa première découverte majeure est la découverte des galaxies en 1923. En effet, avant cela, on pensait que ces nébuleuses comme on appelait alors ces objets, qui étaient trop gros pour être des étoiles, étaient situés dans notre galaxie. Après avoir identifié plusieurs galaxies, il commence leur classification en galaxies elliptiques, spirales et spirales barrées, ou lenticulaires. C’est en étudiant ces galaxies qu’il va mettre en évidence la loi qui porte son nom. Cette loi avait été préalablement mise en évidence plusieurs années auparavant par l’astronome Georges Lemaitre. Jean Pierre Luminet nous faisait d’ailleurs remarquer il y a un mois que ce prêtre belge n’était vraiment pas assez reconnu pour ces immenses apports à la cosmologie. Bref, en étudiant ces objets que sont les galaxies, il remarque que plus elles sont éloignées, plus elles ont un décalage vers le rouge important.

Galaxies en interaction, par l’instrument WFC3. Credits : NASA, ESA, and the Hubble Heritage Team (STScI/AURA)

Ce décalage vers le rouge est bien connu dans l’univers proche et est créé par l’effet Doppler, connu depuis longtemps en physique classique. Ainsi, un objet émettant une onde sonore ou lumineuse et qui se rapproche ou s’éloigne de nous va agrandir ou diminuer la fréquence de cette onde selon sa direction. En analysant ce décalage, on peut en déduire la vitesse de l’objet dans notre direction. Ainsi, un décalage vers le rouge, en physique classique, signifie que les galaxies s’éloignent de nous. Ce que la loi de Hubble montre, c’est que plus les galaxies sont éloignées de nous, plus elles semblent s’éloigner vite, avec une relation linéaire : la vitesse de l’objet est égale à la distance de cet objet que multiplie une constante, appelée la constante de Hubble. Cela qui veut donc dire que l’univers est en expansion. Attention, si l’on reste dans le cadre de la relativité restreinte, on peut trouver une distance pour laquelle la vitesse sera plus grande que la vitesse de la lumière. Donc ce décalage pour le rouge par effet Doppler ne fonctionne que pour l’univers proche. Pour l’univers plus lointain, il faut alors se placer dans le cadre de la relativité générale, dans laquelle cette vitesse d’éloignement n’est pas une vitesse physique dans un espace fixe, mais un étirement de l’espace temps dans lesquelles les galaxies resteraient globalement fixes.

Cette loi est aujourd’hui parfaitement admise, à tel point qu’on mesure les distances et les âges des galaxies en terme de décalage vers le rouge. Cette mesure observationnelle donne l’avantage de ne pas dépendre des valeurs des paramètres du modèle. Ainsi, si on dit qu’une galaxie est à z = 1, c’est que son décalage vers le rouge donne une “vitesse apparente” de 1 fois la vitesse de la lumière. Si l’on a une valeur de la constante de Hubble cela peut donner une distance. Si l’on fixe d’autres paramètres du modèle (la densité de matière dans l’univers par exemple) on peut alors donner le temps qu’a mis la lumière pour nous en parvenir. Sur ce site, on peut jouer avec ces paramètres. Cette mesure de z permet donc de donner une valeur observable non dépendante des paramètres parfois mal contraints du modèle. On connait quelques galaxie se trouvant à z>6.

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Gif animé de Puyo

A l’époque, cette loi est une révolution, et enlève une sacrée épine du pied à Einstein. En effet, celui-ci essayait à l’époque de faire rentrer un peu de force un univers statique dans sa théorie, ce qui n’était pas très facile. En effet, la masse de l’univers devrait tendre à le “retenir vers l’intérieur”, ce qui devrait le faire décroitre, ou à le faire décroitre si il grandit. Pour admettre un univers statique, il faut imaginer une force répulsive inconnue, qu’Einstein note comme une constante cosmologique dans son modèle, qui permet de contrebalancer la gravité. Il semble que cette hypothèse d’univers statique qu’essayait de prouver Einstein était surtout là pour des raisons philosophiques. Quoi qu’il en soit, Einstein admit son erreur et allât même remercier Hubble.

Genèse du projet

Après cette longue introduction, passons maintenant au télescope. La personne que vous devez absolument retenir pour avoir porté à bout de bras ce télescope, c’est Lyman Spitzer. Dès 1946, ce physicien américain décrit dans un papier les deux principaux avantages d’un télescope spatial. Quels sont ils d’ailleurs ? Dans un premier temps, la résolution angulaire. J’en avais déjà parlé dans mon émission sur les télescopes. Rapidement pour les nouveaux, on parle de résolution angulaire pour désigner l’angle minimum que va détecter un appareil optique et qui va lui permettre de séparer deux points. Ainsi l’oeil humain peut détecter un angle de 1 minutes d’arc environ, ce qui fait qu’il peut séparer deux points séparés de 1 mm à 3 mètres, ou encore deux points séparés de 100 km sur la lune.

Nébuleuse d’Orion (combinaisons d’image ACS et sol). Crédits : NASA, ESA, M. Robberto (Space Telescope Science Institute/ESA), and the Hubble Space Telescope Orion Treasury Project Team

Il y a un petit jeu sur wikipedia (article pouvoir de résolution) sur ça. On prend 3 fois la même image avec des résolutions numériques différentes et on regarde à partir de quelle distance notre oeil ne voit plus la différence entre les images.

Les télescopes ont aussi une résolution angulaire, qui dépend linéairement de la taille de leur miroir principal. Ainsi, un télescope deux fois plus grand permettra de séparer, à une même distance de nous, deux objets deux fois plus rapprochés l’un de l’autre. Le problème c’est que l’atmosphère vient tout gâcher. En brouillant les images, elle va fortement diminuer la résolution d’un télescope, pour la ramener de toute façon à celle d’un télescope de 30 cm de diamètre. Ce problème a été traité sur Terre grâce à l’optique adaptative (voir mon dossier sur les télescopes) qui ironiquement a été pour la première fois rendue techniquement possible à peu près au début des années 90, quand Hubble a été lancé. Mais en 1946, niet !

Et puis il reste de toute façon l’autre avantage de l’espace : accéder à la lumière qui ne nous parviens pas. En effet, l’atmosphère arrête une grande partie de la lumière qui arrive de l’espace. Ainsi, les ultraviolets sont en grande partie arrêtés par l’atmosphère. Un autre problème apparait aussi si vous voulez détecter de l’eau sur certains objets. La seule façon est de regarder l’objet et de prendre son spectre, c’est à dire les variations de lumière pour chacune des longueurs d’ondes, et de regarder si il présente des raies caractéristiques (des “trous” dans le spectre) d’absorption de l’eau. Le problème c’est que si vous faites ça depuis la Terre, il y a de grandes chances que vous trouviez de l’eau un peu partout, car l’atmosphère, gorgée d’eau, va créer elle même ses raies en absorbant la lumière.

Intermède : demande de temps Hubble

Au passage, j’ai déposé une demande d’observation avec Hubble le mois dernier justement pour regarder justement une raie spécifique de l’eau sur des exoplanètes. Je le dis pas seulement parce que je suis super fier, mais aussi pour présenter le système de demande de temps de ce télescope. C’est sans doute l’un des télescopes les plus difficiles obtenir encore de nos jours, avec une proposition sur 12 acceptée seulement (et le nombre de proposition est en augmentation chaque année). Les chercheurs écrivent une demande, dans laquelle en plus d’expliquer à quel point ça va leur donner des résultats de dingues, ils doivent aussi justifier que ce qu’ils veulent faire n’est possible que depuis l’espace. Les demandes sont ensuite envoyées au Space Telescope Science Institute, à Baltimore où elles sont réparties dans plusieurs comités de scientifiques reconnus qui les évalue avec impartialité. La particularité de ces demandes est aussi qu’elles viennent avec de l’argent, souvent assez pour permettre de payer quelqu’un pendant un an ou plus. Ainsi, on s’assure que ces données seront bien traitées et donneront des résultats de qualité. Et les résultats suivent. Pour le 25 ème anniversaire la directrice du STScI a annoncé “presque 13’000” papiers publiés utilisant des données Hubble, ce qui en fait l’un des instruments scientifiques les plus productifs à ce jour, toutes sciences confondues.

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Hubble, par Puyo

Mais retournons au télescope. Une amélioration qu’on cite souvent (je l’ai même entendu chez e-penser), c’est que le télescope peut observer jour et nuit. C’est vrai et faux. Pour la plupart des étoiles, le télescope ne pourra observer que le temps d’une demi orbite, car le reste du temps, il est entre la Terre et le Soleil et il ne peut pas observer aucun de ces deux objets. Donc souvent pendant ce temps la, on tourne pour acquérir une nouvelle cible et on décharge les mémoires vers la Terre. Donc ca fait une observation de 45 minutes au plus en gros pour la majorité des étoiles. Si un objet est très au Nord ou très au Sud, on est jamais gêné par la Terre et normalement, on peut faire de très très longues poses effectivement. La planification des orbites est vraiment très compliquée. On ne peut pas anticiper plus de deux semaines en avance car les perturbations sur le télescope font que sa trajectoire est difficile à prévoir. On doit faire tenir aussi les décharges de mémoire, les acquisitions de cibles, tout en maximisant le temps d’observation et en prenant en compte l’intérêt scientifique, comme le fait que certaines observations doivent être faites proches dans le temps ou à une certaine période si c’est un événement court. Bref, le STScI de Baltimore a des ordis qui chauffent fort et en fait le bâtiment est chauffé par ses machines (on m’a dit que dès que la température extérieur dépasse 10 degrés, ils sont obligés de mettre la clim pour refroidir le bâtiment tellement les serveurs dégagent de chaleur).

Retour à la Genèse

La route fut longue pour Spitzer, qui y dévolue toute sa carrière. En effet, le cout prohibitifs et les défis techniques sont des freins importants. Cependant, en 1968, la NASA commence à développer des plans fermes pour un projet de télescope spatial de 3m appelé alors Large Space Telescope (LST), prévu pour 1979. Ce projet comprend une possibilité de rénovation par les humains, ce qui allait parfaitement avec le projet de navette spatiale qui est aussi mis dans les tuyaux exactement la même année. Initialement, il était même prévu de pouvoir ramener Hubble sur Terre dans la navette pour des remises à niveaux. Bon et puis on s’est rendus compte que ça coutait assez cher et que, les projets spatiaux étant toujours extrêmement dépendant du climat politique et de l’humeur du congrès, un cadre de la NASA expliquait en 1984 que “si nous ramenons Hubble à Terre, il ne va jamais redécoller”.

Bon 1979, c’est un peu ambitieux et le projet va prendre du retard et dépasser son budget. Le lancement de ce qui est devenu entre temps le Hubble Space Telescope ou HST, est finalement prévu pour octobre 1986. Cependant, en Janvier de cette même année, la navette Challenger explose au décollage, tuant 7 astronautes et mettant en pause les lancements. Hubble, quasiment prêt, est alors stocké dans une immense salle blanche (une pièce extrêmement propre pour éviter que des poussières ne se déposent sur les optiques), ce qui coûte environ 6 millions de dollars par mois. Le projet, initialement estimé à 400 millions, va finalement taper le 2.5 milliards le jour où il sera finalement envoyé, il y a 25 ans, le 24 Avril 1990. Le coût à ce jour, avec les missions d’entretien et la surveillance 24h/24, approche 10 milliards de dollars. Cependant, comme pour tous les projets de ce type, il faut le ramener aux échelles de temps mises en oeuvre et cela revient en comptant seulement la durée d’utilisation, à 1.5 dollars par an et par américain. Mais tout de même, c’est cher. Alors il faut que ca marche !

Photo anniversaire de Hubble : le regroupement d’étoile Westerlund 2 au sein de la nébuleuse Carina, combinaison d’images ACS et WFC3. Crédits : NASA, ESA, the Hubble Heritage Team (STScI/AURA), A. Nota (ESA/STScI), and the Westerlund 2 Science Team)

La panne

Et justement ça ne marche pas. Mais pas du tout. Très vite, on s’aperçoit que les panneaux solaires ne sont pas assez rigides et vibrent un peu lorsqu’ils changent de température en passant du soleil à l’ombre, soit toutes les 50 minutes environ. En passant, c’est l’agence spatiale européenne qui s’était occupée des panneaux solaires en échange d’un temps d’accès au télescope pour les astronomes européens. Ils s’en sont d’ailleurs vantés sur Facebook la semaine dernière pour les 25 ans et j’ai partagé leur lien avant d’apprendre qu’ils étaient défectueux et que le community manager aurait mieux fait de s’abstenir.

Mais le plus gros problème vient de la NASA. Un mois après le lancement, le télescope réagit toujours très bizarrement. On prend des images et la qualité est à peine meilleure que sur Terre. La résolution angulaire, ce qui fait apparaitre les contours bien nets, n’est pas au rendez vous. Quand on s’aperçoit que tous les instrument sont dans ce cas, c’est la crise : ça vient d’une des première optiques, les plus grosses, et ça complique la mission. Quand on réalise que c’est un défaut du miroir primaire, beaucoup trop important pour être corrigé avec les moyens embarqués, c’est terrible. L’erreur est identifiée en quelques mois, il s’agit d’une aberration sphérique : le bord du miroir ne fait pas la mise au point au même endroit que le centre du miroir, ce qui résulte en une image “floue” d’un point et donc d’une résolution angulaire complètement dégradée.

Aberration sphérique pour une lentille

Les directeurs des différents instruments réalisent un par un les conséquences pour les performances : Jim Westphal, designer du principal instrument, le Wide field planetary camera (WF/PC, prononcé affectueusement wifpic) réalise qu’à 61 ans, il a consacré 14 de sa carrière à cet instrument, dont l’aberration optique “balaye essentiellement l’intégralité [du] programme scientifique”. L’astronome Sandra Faber qui fut l’une des premières à identifier précisément le problème, envisage le pire dans son journal : une commission d’enquête du congrès américain, la fermeture de la NASA, l’astronomie tout entière devenant une science paria, les carrières des jeunes chercheurs brisées… Ce n’est pas tant pessimiste que ça. On est 4 ans seulement après Challenger, les deux principaux projets de la NASA depuis 20 ans sont au mieux un semi échec. L’URSS est en train de s’écrouler et la course à l’espace perd de son intérêt. Les journaux sont très critiques, le Los Angeles Time écrit : “Le monde voit maintenant le résultat honteux du laxisme et des incapables de la NASA”. LA NASA voit ses heures les plus sombres et perd le soutien populaire. Dans la comédie Y a t il un flic pour sauver le président sortie en 1991, Hubble est représenté à côté de plusieurs échecs célèbres de projets énormes : le Titanic et le dirigeable Hindenburg.

Détails de la nébuleuse de l’aigle, par l’instrument ACS. Crédits : NASA, ESA, and The Hubble Heritage Team (STScI/AURA)

Comment la NASA a t elle pu se planter à ce point sur ce qu’elle présentait comme le meilleur miroir jamais mis au point ? La commission d’enquête débarque chez le sous-traitant qui a fabriqué le miroir. Il avait aussi fabriqué une machine extrêmement perfectionnée pour mesurer la surface du miroir avec une précision inégalé. Cependant, un capuchon qui devait être non réfléchissant à été éraflé et la machine a parfaitement réalisée sa tâche : faire le meilleur miroir jamais conçu, mais en focalisant sur le reflet sur le capuchon, 1.3mm trop près. Des tests sur des machines plus rudimentaires ont mis en évidence l’aberration sphérique, mais les ingénieurs les ont mis de côtés, au motif que la machine qu’ils avaient construite était plus précise. L’erreur est de seulement 2 micromètres au niveau du bord, mais détruit les performances en résolution.

La résurrection

Très vite, la riposte se met en place en particulier au Space Telescope Science Institute. La première mission de réparation prévue est en 1993. Ces missions étaient prévues tous les 3 ans en moyenne pour remplacer les instruments qui sont standardisés pour facilement s’enlever et se remplacer comme des modules. La NASA souhaite en priorité faire des belles images pour sauver sa réputation et incorpore donc des modifications sur l’instrument qui devait de toute façons être changé, WF/PC 2 est automatiquement améliorer en rajoutant des optiques qui introduisent le défaut inverse. Pour les 4 autres instruments, il faut aussi trouver une solution. Certains envisagent de faire descendre un astronaute dans le cylindre à l’intérieur de Hubble. Mais il y a le risque qu’il reste coincé… en direct à la télé américaine, ce ne serait pas vraiment la meilleure pub pour la NASA. Finalement, Jim Crocker du STScI trouve une solution. Ils construisent un module qui pourra rentrer à la place d’un autre instrument, mais qui une fois dedans se dépliera pour faire passer des optiques devant le faisceau de tous les autres. On devra sacrifier un instrument, mais on sauvera les autres. Ainsi est désigné COSTAR (Corrective Optics Space Telescope Axial Replacement).

Kathryn Thornton remplaçant un des panneaux solaires de Hubble lors de la première mission de maintenance du télescope spatial (STS -61).

La première mission de maintenance de Hubble, en 1993 est la plus ambitieuse jamais tentée à cette époque. Elle incorpore un suisse, Claude Nicollier, et une femme, Kathryn C. Thornton, ce qui est suffisamment rare pour être noté. En 5 jours et autant de sorties spatiales, les membres de l’équipe changent les panneaux solaires, remplace WF/PC 1 par WF/PC 2, met en place COSTAR, remplace 4 gyroscopes, change des unités mémoire, et remplace d’autres composants.

La mission est un succès complet et la science peut maintenant commencé à plein temps. Voici différentes versions de l’image de l’étoile Eta-Carinae,entourée de sa nébuleuse, prises avant Hubble, depuis la Terre, puis à différente époques de la vie d’Hubble. On voit très nettement l’amélioration.

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Les différentes missions de services de la navette américaine ont permis d’augmenter la durée de vie de manière spectaculaire. Apportant, parfois in-extremis, les composants nécessaires à sa survie, elles ont aussi remplacé un par un les instruments. Le télescope est donc toujours pourvus d’instruments récents permettant de faire des observations d’excellente qualité, comme le prouve son succès, avec l’augmentation du nombre de demandes de temps chaque année dont on a parlé. Les instruments suivants ont intégrés en interne l’aberration, et COSTAR fut redescendu en même temps que le dernier instrument de première génération. Après 16 ans dans l’espace, il est aujourd’hui exposé au musée de l’air et de l’espace de Washington. La dernière mission de réparation a eu lieu en 2009 et la navette est maintenant clouée au sol. Hubble est maintenant livré à lui même mais on pense qu’il devrait tenir au moins jusqu’à 2020, permettant une superposition avec son remplaçant le James Webb Space Telescope, lancement prévu en 2018.

La science (enfin)

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Hubble, par Inti

En 1995, on a décidé de prendre une région très au Nord, ce qui permettait une observation quasiment en continu comme je l’ai dit, et de l’observer intensivement pendant 8 jours, avec plusieurs filtres spectraux. En cumulé, plus de 140h d’observation on permis d’obtenir ce qu’on appelle le Hubble Deep Field. On a choisi cette région pour évite les étoiles de la galaxie et pouvoir creuser loin sans saturer l’image avec des objets proches et le résultat est impressionnant : près de 3000 galaxies furent découvertes dans cette région du ciel grande comme une balle de tennis à 100m. Cette analyse est un des papiers les plus cités de Hubble avec 970 citations à ce jour. Elle a permis de trouver de nombreuses galaxies à très haut décalage vers le rouge (c’est à dire avec un grand z, maintenant vous savez ce que ça veut dire). De fait, avant cette image, on connaissait très peu d’objets ayant un z supérieur à 1. Dans le Hubble Deep Field, on est remonté à z = 6. Ces galaxies à haut décalage vers le rouge sont très éloignées donc aussi très jeunes, ce qui a permis de comprendre beaucoup de choses sur l’évolution des galaxies. En particulier, il a permis de montrer que les fusions et collisions de galaxie étaient plus fréquentes dans l’univers jeunes.

Enfin, en 1998, on a refait la même opération vers le sud et obtenu des résultat similaires, ce qui valide l’hypothèse que l’univers est isotrope et homogène, c’est-à-dire au final que nous ne sommes pas vraiment en un endroit particulier de l’univers.

Enfin, l’une des théories à cette époque était que la matière noire était constituée de Machos (en anglais Massive Astrophysical Compact Halo Objects) c’est à dire des objets massifs mais très peu lumineux comme les naines brunes. Marco en avait parlé dans son épisode sur la matière noire. Le Hubble Deep Field a permis d’invalider cette hypothèse devant le faible nombre de naines brunes dans l’image. En 2003, Hubble a réalisé un Ultra-Deep Field avec plus de 275 heures d’observation d’une même région. Ces grands champs sont quelques choses d’encore assez inaccessibles depuis le sol, même avec les dernières techniques d’optique adaptative.

Le Hubble Ultra-Deep Field, dans la constellation du Fourneau.
Le Hubble Ultra-Deep Field, dans la constellation du Fourneau.

Une autre découverte de Hubble concerne les trous noirs dont nous a parlé Jean-Pierre Luminet le mois dernier. Ainsi, on a trouvé des trous noirs super massifs au centre de la plupart des galaxies. On a aussi pu mettre en évidence qu’il existe une relation entre leur masse et la luminosité de la galaxie, ce qui montre une évolution en tandem.

Enfin, retour à Edwin Hubble pour la fin. Les observations de galaxies ont permis de bien contraindre la constante de Hubble avec une bien meilleure précision qu’auparavant (on est passé de “entre 50 et 90” à 72±8). Mais ce n’est pas tout. En 1998, deux équipes concurrentes, la High-z Supernova Search Team et le Supernova Cosmology Project ont utilisé des observations au sol et Hubble pour observer des Supernovae de type 1a. Ces explosions, assez courtes, viennent du fait que des naines blanches accrètent de la matière d’une autre étoile proche. Lorsqu’elle dépasse une certaine masse, elles explosent avec une luminosité extrêmement importante et très bien contrainte. En observer une depuis la Terre permet donc de bien contraindre la distance de ces objets, même si elles sont situées dans des galaxies très lointaines. Ces observations ont permis d’évaluer avec précision l’évolution de la constante d’Hubble au cours du temps. Et surprise, ces observations ont montré que l’univers… accélérait ! Ainsi, Einstein avait raison ? L’univers ne s’écrase pas, ne ralenti pas, une force inconnue contre bien la gravité et pousse l’univers vers l’extérieur. Cette énergie est appelée énergie sombre et certains cosmologistes lui trouvent beaucoup de points communs avec la constante cosmologique qu’Einstein avait jeté à la poubelle dans les années 30. Cette découverte a value le prix Nobel à Brian P. SchmidtAdam Riess et Saul Perlmutter en 2011.

Conclusion

Pour finir, Hubble, c’est aussi un apport magistral  à l’astronomie grand public et nombre énorme de photos fantastiques. N’hésitez pas à aller voir dans les liens.

Zoom sur l’étoile V838 Monocerotis et son évolution au cours du temps.

Sources :

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