Aux origines des objets mathématiques

Histoire de lancer la discussion, une question stupide : Est-ce que vous voyez bien ce que veut dire « 27 » ? (j’ai fait exprès de ne pas prendre 42, l’exemple n’aurait pas été probant…)

Est-ce que quelqu’un se sent mal à l’aise avec 27, ne voit pas bien ce que ça veut dire ?… Non ?

J’ai donc une bonne nouvelle pour vous : vous êtes tout à fait capable d’abstraction, ou alors  je vous défie de me faire rencontrer 27 en personne ou au moins de m’en faire un dessin. Vous arriverez bien à me dessiner 27 points, 27 pommes, à m’écrire 27 en chiffres romains, en chiffres arabes, en toutes lettres, mais vous ne me dessinerez jamais le véritable « 27 » que vous avez dans la tête, pour la bonne raison que c’est impossible : c’est un objet par définition complètement abstrait. Et pourtant, j’espère qu’il ne vous pose pas de problème.

Deuxième question : est-ce que quelqu’un pourrait me montrer un électron ? Une force ?

Bon, ça c’est juste pour régler mes comptes avec les physiciens : qu’on arrête de nous faire croire qu’ils sont dans le concret ! Personnellement, j’ai beaucoup plus de mal à comprendre ce qu’est un électron que de me représenter un espace de dimension n. Question d’habitude et de bonne volonté.

Tout débile qu’il paraisse, l’exemple des nombres me paraît très intéressant ; essayons d’imaginer comment cet objet mathématique élémentaire est apparu. Évidemment, on manque de vidéos et d’écrits de l’époque, mais on peut regarder par exemple comment les enfants comprennent, construisent cette notion. Il se trouve que je côtoie régulièrement des instits, qui m’ont raconté la chose suivante : il arrive assez souvent, pour « obliger » les petits à compter, que les enseignants (qui comme chacun sait sont de grands manipulateurs), demandent à l’un d’eux d’aller par exemple chercher des assiettes pour toutes les personnes de sa table, se disant : « Les assiettes sont dans la pièce d’à côté, il/elle ne pourra pas regarder les gens en prenant les assiettes, et sera donc bien obligé de compter. Mouha ha ha ha ! » C’est vrai que parfois ça marche. Mais souvent, c’est un échec lamentable : l’enfant montre chacune des personnes de sa table avec l’un de ses doigts, et garde ceux-ci tendus jusqu’à la pile d’assiette. Il prend alors une assiette par doigt tendu, et revient triomphant sans avoir eu besoin à aucun moment de compter plus loin que « 1 » ! Ce qu’il vient de faire, c’est ce qu’en terme technique mathématique on appelle une « bijection », autrement appelée correspondance terme à terme, autrement appelé : « si je veux savoir s’il y a autant de chaises que d’invités, je ne vais quand même pas compter les chaises et les invités, je vais plutôt dire à tout le monde de s’assoir, et on verra bien s’il y a autant de chaises que d’invités, ou plus de l’un ou de l’autre ».

En gros, c’est à partir de cette notion que les mathématiciens définissent aujourd’hui les nombres entiers, et c’est probablement comme ça que cette notion est apparue : à force de voir qu’il y a quelque chose de commun entre 5 pommes, 5 doigts et 5 personnes, on finit par trouver naturel et bien pratique de donner un nom à ce truc commun : « 5 ». On peut commencer à dire des choses comme « 5 + 3 = 8 », sans se soucier de savoir si ces nombres représentent un objet ou l’autre, et en sachant que le résultat sera le même quelques soient les objets en question. À partir de là, « 5 » et les autres nombres deviennent des objets d’étude possibles pour eux-mêmes, juste pour comprendre comment ça marche, parce que c’est intéressant, sans avoir de problème concret et immédiat à résoudre.

Une abstraction mathématique est née sous nos yeux ébahis ! La porte est ouverte à toute une série de questions plus ou moins stupides, ou qui paraissent stupides pour des gens extérieurs, sur les nombres premiers par exemple…

Pour ce genre d’apparitions d’objets mathématiques, on peut citer Poincaré (j’aime citer Poincaré) :  « La mathématique est l’art de donner le même nom à des choses différentes »

Autre exemple dans cette catégorie, un peu plus compliqué, la naissance des équations, et notamment de l’inconnue, ce fameux « x » qui traumatise tant de personnes.

Si on cherche l’origine de cet objet mathématique, il faut remonter à l’Antiquité. On trouve par exemple des problèmes de géométrie comme le célèbre « partage en extrême et moyenne raison ». Le but est de couper un segment en deux de façon à ce que la longueur du petit morceau divisée par la longueur du moyen morceau donne le même résultat que la longueur du moyen morceau divisé par la longueur du segment entier.

Un petit dessin vaut mieux…

robin_objets_illus1

On veut donc trouver a et b tels que b/a = a/(a + b)

On trouve bien d’autres problèmes géométriques, portant sur des surfaces, des volumes, qu’on traduirait aujourd’hui avec des x dans tous les sens, des recherches de racines carrées… À l’époque, les savants savaient résoudre ces problèmes, pour eux géométriques, avec des méthodes géométriques. (théorème de Thalès, de Pythagore et autres…)

Par ailleurs, dans l’Antiquité toujours, les Egyptiens d’il y a 4000 ans par exemple, résolvaient également des problèmes du type : « un nombre et son septième vaut 19. Quel est ce nombre ? » Assez rapidement, et notamment chez les Grecs, on résout même des problèmes que l’on traduirait aujourd’hui en équation du second degré, les exemples abondent. L’important est de retenir que les méthodes de résolutions sont toujours soit géométriques, soit numériques, et qu’a priori on ne fait pas le lien entre les différentes familles de problèmes. Un nombre et une « grandeur », soit une longueur, une surface, un volume, ne sont pas de même nature, et appartiennent à deux chapitres complètement séparés.

Au 9ème siècle, Al Khwarizmi frappe donc un grand coup en faisant la liste des « problèmes types » concernant des valeurs que l’on cherche, en les formulant sans préciser la nature de ces valeurs ; il parle seulement d’une « chose ». Par exemple : la chose au carré plus cinq fois la chose vaut 3. Que vaut la chose ? Et il propose une méthode de résolution. Mine de rien, il vient d’inventer deux objets mathématiques essentiels : l’inconnue et l’équation. Bien sûr, comme c’est le premier à le faire, c’est encore très laborieux : il reste avec des phrases, sans formalismes, sans utiliser de lettre pour cette fameuse inconnue, il refuse les valeurs négatives dans l’équation et comme solution (ben oui, une longueur négative, ça manque de sens, et il continue à prouver ses résultats en passant par la géométrie). Mais il a tout de même franchi un cap conceptuel énorme : désormais, on peut étudier les équations pour elles-mêmes, et on sait que tout ce qu’on trouve sera applicable à tous les problèmes qui peuvent s’y ramener, qu’ils soient géométriques, financiers, arithmétiques… Cette approche permettra, bien plus tard, d’envisager des équations de degré plus grand que 3, qui a priori n’avaient aucun sens en géométrie.

L’algèbre est le chapitre roi de ces rapprochements. Pour résoudre ces équations (enfin celles de degré plus élevés), Galois, au 19ème siècle, aura l’intuition de l’importance énorme de l’objet « groupe », qui s’applique à tout ou presque en maths, et qui ouvre la voie à tout un tas d’objets de la même famille, comme les corps, les anneaux… Le groupe permet de nommer le truc commun entre un cube qui tourne, les mariages chez les Warlpiris d’Australie (cf le dossier à la soirée « l’amour est dans la pipette») et un mélange de cartes, par exemple…

Tous les objets mathématiques ne prennent évidemment pas naissance de cette façon.

Certains objets apparaissent pour simplifier la vie, aider à comprendre, et générer des nouvelles questions, de nouvelle façons de voir, qui devront être éclaircies.

C’est notamment le cas de beaucoup de notations, comme les chiffres. On ne peut pas dire à proprement parler que quelque chose est créé, mais la numération de position, que nous employons (se référer au numéro de Nico sur le 0), est une notation beaucoup plus pratique que les précédentes. Il va devenir beaucoup plus simple de faire des calculs. La notation décimale pourra apparaître, faisant des nombres rationnels (les nombres qui peuvent s’écrire sous forme de fraction de deux nombres entiers) des nombres comme les autres, et non plus de simples rapports entre deux nombres. On passe de « Le rapport de 1 à 2 » à « 0,5 », qui prend naturellement place entre 0 et 1.

Notons que tout ne se passe pas simplement, et ce qui nous apparaît évident n’est pas toujours ce qui est le plus simple à adopter : encore au 19ème siècle, des savants, et non des moindres, continuent à dire que les nombres négatifs n’ont pas de sens (Citation de Carnot : « Il faudrait pouvoir enlever quelque chose de rien, ce qui est absurde ! »)

Bref, cette notation des nombres incite petit à petit à les ranger tous, entiers ou non, positifs ou négatifs, sur la « droite des réels », même si on ne sait pas encore bien ce que recouvre ce terme.  Et cette vision des choses fait apparaître la notion même de « nombre réel », avec le questionnement sur leur nature, leur définition, qui ne sera faite proprement qu’à la fin du 19ème siècle, et qui sont tout sauf intuitifs (le dossier de Nico sur l’infini devrait vous convaincre!) Pour faire court : on voudrait que chaque point de la droite corresponde à un nombre et chaque nombre à un point de la droite. Ce n’est pas si simple que ça à comprendre (pour vous en convaincre, essayez donc de trouver ce que peut vouloir dire « le nombre juste après 0 », par exemple…)

Là, c’est pour un problème de compréhension d’un objet mathématique, de cohérence que l’on « créé » un nouvel objet mathématique, ou qu’on le découvre et qu’on le nomme.

À propos de nombres compliqués, parlons un peu de pi. Son histoire est très intéressante : on dit par exemple que c’est Archimède le premier à le calculer. Malgré tout le respect que je lui dois, il me semble compliqué de le formuler de cette façon. Si on se renseigne un peu, on se rend compte par exemple que bien des personnes avant lui avaient remarqué que pour n’importe quel cercle, de n’importe quelle taille, le périmètre était un peu plus grand que 3 fois le diamètre. Les Égyptiens, plus de 1000 ans avant lui, avaient même trouvé une approximation de la surface du disque loin d’être ridicule. On pourrait dire que ce sont ces personnes qui ont calculé pi, de façon approchée. Et là, bien malin qui saura donner un nom et une date ! Ce qu’Archimède a fait, c’est de donner une méthode permettant d’encadrer de façon aussi précise que l’on veut sa valeur. Ce qui signifie que l’on savait déjà qu’il y avait une valeur à calculer…

En plus ce n’est pas un nombre qu’il calculait, mais le rapport du périmètre au diamètre. Pour lui ce n’était pas un nombre. Si on le lit, on aura une phrase du style : « le rapport du périmètre d’un cercle à son diamètre est plus petit que le rapport de 22 à 7 et plus grand que le rapport de 223 à 71 ».

Il y avait les nombres entiers (dont 1 était exclu), les « grandeurs » géométriques et les rapports. Pas encore de fractions, donc, et encore moins de nombres « à virgule ». De toutes façons, il n’y avait pas de façon de noter ça. Donc quand on dit qu’Archimède à calculé sur pi, ce n’est pas tout à fait exact, puisqu’il n’avait pas dans l’idée de calculer un nombre, ni même une grandeur, mais un rapport.

On pourrait donc dire que la création de l’objet mathématique « pi » vient plus tard, petit à petit : est-ce que c’est la personne qui l’a vu comme un nombre ? Celle qui lui a donné un nom ? Ce qui est sûr, c’est qu’entre l’Antiquité et aujourd’hui, on n’a plus la même vision de ce qui pourtant tourne autour d’une même idée.

En tous cas aujourd’hui, pi est un nombre, que l’on peut définir de plein de manières différentes (et pas forcément en lien avec un cercle), et sur lequel on a encore des questions en suspens.

Autre exemple du même ordre, le cas des nombres complexes, qui mériterait probablement un dossier à lui tout seul. Essayons tout de même d’en parler rapidement, uniquement du point de vue de leur apparition.

On a vu comment les équations étaient nées. Au début, il n’y avait que des équations de degré 1, 2 ou 3. La raison en est simple : on se référait encore toujours à la géométrie… Or si l’on a su très vite résoudre les équations de degré 1 ou 2 (c’est à dire avec x ou x2 dedans), on ne savait pas résoudre celles de degré 3. Savoir résoudre une équation, c’est avoir une formule, une méthode, permettant de dire : tu me donnes les coefficients de l’équations, je te calcule le(s) résultat(s) sans réfléchir. L’exemple le plus simple, c’est pour une équation de degré 1 : elle peut toujours s’écrire sous la forme ax + b = 0, et le résultat est toujours : x = -b/a.

Or un jour, un mathématicien, surnommé Tartaglia (« le bègue », et en plus il était nain) trouva une formule pour le degré 3, qui se trouva rapidement diffusée (par Cardan, qui lui avait soutiré en promettant de ne jamais en parler…). Et parfois, au milieu des calculs permettant de trouver la ou les solutions, on tombait sur un monstre : la racine carré d’un nombre négatif. Il faut savoir que cela ne veut a priori rien dire : la racine carrée d’un nombre est le nombre qui, multiplié par lui même vaut ce nombre. La racine carrée de 4, par exemple, est 2, car 2x 2 = 4. Ou à la rigueur -2, car (-2)x(-2) = 4 aussi. Mais racine carrée de -4, cela signifie un nombre qui multiplié par lui même vaut -4. C’est absurde, il suffit de connaître la règle des signes pour s’en rendre compte : un nombre positif au carré, c’est plus par plus, ça donne un nombre positif. Un nombre négatif au carré, c’est moins par moins, ça donne plus aussi. Le problème, c’est qu’en s’autorisant l’écriture des ces « montres » dans la formule donnant les solutions des équations de degré 3, il arrive que ceux-ci s’annulent au cours du calcul, et que l’on tombe sur un bon nombre bien de chez nous, solution du problème (positif, évidemment, sinon ce n’était pas une solution!) C’est donc bien pratique. Personne n’aurait envisagé appeler ces intermédiaires de calcul des « nombres », ou leur donner le moindre sens : ils ont juste été baptisés « nombres imaginaires », et adoptés car trop pratiques.

Plus tard, on s’est rendu compte qu’il y avait d’autres nombres imaginaires, bien pires, qui apparaissaient dans la résolution d’autres équations : des racines carrées de racines carrées de nombre négatifs, baptisées « nombres imaginaires du second ordre ». et bien sûr, on peut toujours rajouter des racines carrées… Donc plein de nombres imaginaires différents.

Sauf qu’encore plus tard, d’Alembert a démontré que tous ces nombres imaginaires pouvaient en fait s’écrire de la même façon : un nombre « normal » plus un nombre normal que multiplie racine de -1. (a + ib, pour les connaisseurs). Ces nombres auxquels on ne donnait pas trop de sens n’étaient donc pas si compliqués, puisqu’ils avaient une structure assez simple. De là leur nom de « complexes » pas pour dire qu’ils sont compliqués, mais pour dire qu’ils sont composés, de deux parties.

Passons sur la suite, ces nombres ont une longue histoire et trouvé pleins d’applications diverses et variées, je trouve juste intéressant de voir comment ils sont passés d’intermédiaires de calculs pratiques à nombres avec une certaine structure finalement assez simple à manipuler.

Autre grosse source de création d’objets mathématiques bien sûr : le rapport au réel, la modélisation.

La géométrie en est bien sûr un exemple frappant, quoiqu’aussi « bêta » que les nombres. Les formes de bases sont inspirées de celles que l’on construit le plus simplement avec une corde : le cercle, la ligne, la ligne droite, les polygones…

On voit bien le principe : l’objet mathématique est alors une sorte de simplification à l’extrême d’un objet réel. Il y a encore l’idée de regrouper sous le même nom des objets différents, d’une certaine manière, puisque tous les « cercles » imparfaits de la nature se réfèrent à un même modèle mathématique. Et de même qu’il est impossible de montrer « 27 », il est impossible de montrer un cercle, un segment, un point, toutes sortes d’objets qui nous semblent pourtant très naturels. (d’ailleurs, trouver une définition du point est un problème très intéressant).

La définition d’Euclide, référence en la matière, du segment de droite permet de se rendre compte que le cordon avec le monde concret n’est pas complètement coupé : « la ligne droite est celle qui repose également entre ses deux extrémités ». La ficelle n’est pas loin !

Autres exemples de modélisations : les équations, bien sûr, les suites numériques avec une règle permettant de passer d’un terme au suivant (l’idée est souvent de tenter de prévoir l’évolution d’un phénomène), les probabilités…

Développons un exemple : les graphes. L’histoire est connue, j’essaye de la raconter du point de vue qui m’intéresse dans ce dossier.

Or donc, au 18ème siècle, dans la ville de Königsberg, les habitants se posent une question fondamentale : « Est-il possible de faire une promenade dans notre ville en passant par tous les ponts, mais sans passer deux fois par le même pont ? »

Voici le plan de ladite ville :

Konigsberg

Soyons clairs, on n’y voit rien. Faisons ressortir le fleuve et les ponts, puisque c’est ce qui nous intéresse :
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Tiens mais au fait, les rues, les carrefours, les maisons, ça n’a aucun intérêt ! Tout ce qui compte, c’est le nombre de morceaux de terre séparés les uns des autres, et le nombre de ponts qui les relient entre eux ! Dessinons les pour y voir plus clair :

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D’ailleurs, pourquoi garder le plan ? J’ai là tout ce qu’il faut pour répondre à la question :

robin_objets_illus5

Et on peut même changer la forme de ce dessin pour obtenir un dessin plus symétrique, plus régulier, plus clair : il est évident que les distances et les formes ne jouent aucun rôle dans ce problème.

Et paf ! En simplifiant ainsi le problème à l’extrême pour mieux y réfléchir, en ne gardant que les informations nécessaires à la résolution du problème, en se plaçant donc dans le bon cadre, Leonard Euler dessine le premier « graphe » (nom savant donné à un ensemble de points reliés par des traits)  de l’histoire des mathématiques.

Les objets ainsi créés sont ensuite apprivoisés, mis en lien avec d’autres, deviennent à leur tour de la matière première qui permet de créer des objets un étage au dessus dans l’abstraction, mais toujours pour faire le plus simple possible !! Et n’oublions pas que très souvent, ces objets se trouvent soudainement au centre d’une application : aujourd’hui, les graphes servent par exemple à modéliser tous les réseaux, routiers, internet, téléphoniques…

Pour finir, un mot rapide sur le fameux débat : « les maths sont elles inventées ou découvertes ? »

il me semble que ça fait partie des débats relativement stériles, sur lesquels les personnes qui ont un avis n’en changeront pas, et dans lequel nous n’auront jamais d’argument décisif.

Mais le sujet peut amener des remarques qui me paraissent tout de même intéressantes :

  • il est clair qu’une fois qu’on a le cercle, on n’invente pas pi, on le trouve (si on avait pu faire le moindre choix, on se serait clairement simplifié la vie en choisissant une valeur moins pourrie);
  • on peut très bien vivre sans maths : des civilisations entières (comme par exemple les Warlipiris dont j’ai parlé dans le dossier « l’amour est dans la pipette ») vivent même sans nombres !

Du coup, qu’est ce que ça veut dire que les maths sont universelles ? Comme le dit Poincaré (encore lui!) en substance : les mathématiques devraient être une évidence pour tout le monde, puisqu’il ne s’agit que d’enchaînements logiques, qui en principe ne sont qu’une mise en forme du « bon sens » partagé par tous les humains. Or tout le monde ne comprend pas, et pire, les meilleurs des mathématiciens font régulièrement des erreurs… Alors ? Il n’y a pas que la logique, on décide d’aller dans telle ou telle direction, suivant ce qui nous paraît faire sens, avoir un intérêt. On peut même parfois se forger des outils pour répondre à un problème précis… Il n’y aurait clairement pas de mathématiques sans êtres humains. Mais une fois les objets apparus, leur propriétés sont imposées, les mathématiciens ne sont pas libres de ce qu’ils trouvent. Ils peuvent tout au plus se fabriquer un nouveau cadre dans lequel ils pourront mieux résoudre le problème qu’ils se posent.

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